Accompagner tous les aspects de la relation entre couples
Le soutien des couples s’intègre, au foyer de vie Le Rex Meulen, dans les projets d’accompagnement personnalisés. Au niveau collectif, des groupes de parole et un livre-DVD pédagogique ont été créés.
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Handicap et sexualité : la déontologie face au besoin d’aimer
voir le sommaireAu foyer de vie Le Rex Meulen, à Rexpoëde (Nord), on inscrit explicitement la vie affective et sexuelle dans le projet d’accompagnement personnalisé des déficients intellectuels qui le requièrent. Cette démarche a débuté il y a trois ans, lorsqu’un couple a demandé à passer ses nuits ensemble. « Avait-on le droit de les laisser faire ? Les professionnels craignaient d’engager leur responsabilité », raconte Clémentine Delalonde, directrice de la structure gérée par l’association des Papillons blancs de Dunkerque.
Formation sur la vie affective
Face à ces incertitudes, toute l’équipe a suivi une formation sur la vie affective et sexuelle, à l’Unapei (Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis).
En parallèle, un film de fiction, « Tu veux ou tu peux pas », a été réalisé sur ce thème, avec douze déficients intellectuels du foyer de vie. Demander la permission pour avoir des rapports sexuels, savoir quand et comment faire l’amour, etc., sont des préoccupations récurrentes, mises en scène dans ce support. Complété par un livret pédagogique, il se destine aux professionnels et aux déficients intellectuels grâce à une partie écrite en « facile à lire et à comprendre ».
Le projet a nécessité dix-huit mois de préparation. « Nous accueillons une génération d’adultes qui n’a pas reçu d’éducation à la sexualité en institut médico-éducatif », poursuit Clémentine Delalonde. Des groupes de parole mixtes, animés par l’équipe éducative et une psychologue, ont donc abordé l’anatomie, la pudeur, la distinction entre amour et amitié, à l’aide de la mallette pédagogique « Des femmes et des hommes ».
Ces ateliers se poursuivent aujourd’hui deux fois par mois. Le tabou initial a volé en éclats. « Les résidents se sentent autorisés à parler de sexualité avec l’équipe, qui réagit de manière professionnelle. » Partager un lit est devenu naturel pour tous. « Ils conservent néanmoins leur propre chambre en cas de rupture ou de dispute », précise Séverine Duquennoy, monitrice éducatrice.
Respect de l’autonomie
Surtout, l’équipe soutient les résidents dans tous les domaines de la relation. « La vie de couple n’est aisée pour personne. Mais eux ont besoin de nous pour y réfléchir. » À condition de respecter leur autonomie. « Nous ne les surprotégeons pas. Nous nous assurons juste qu’ils possèdent toutes les informations pour effectuer des choix éclairés », conclut Clémentine Delalonde.
En outre, aborder des questions très intimes avec ceux dont on partage le quotidien reste délicat. Alors, Milène Marquant, conseillère conjugale et familiale, reçoit les couples au planning familial du Littoral, à Dunkerque. Elle intervient aussi au foyer de vie depuis 2013, pour montrer l’utilisation du préservatif, discuter de la contraception, des infections sexuellement transmissibles : « Ils ont besoin qu’on le leur rappelle régulièrement. »
« Nous sommes comme vous »
Nous avons le droit de compter quelqu’un dans notre vie ! Je forme un couple avec Alexandra, une autre résidente du foyer de vie. Nous sommes heureux bien que nous soyons différents des gens normaux. Nous rions souvent ensemble. Et je l’ai invitée à dormir chez moi, dans ma chambre. Avoir un travail, une compagne, trouver un appartement… C’est tout cela être un homme, un adulte autonome. Aujourd’hui, j’ai envie de me poser, d’être avec Alexandra. Et peut-être d’avoir des enfants, mais plus tard ! Pour l’instant, je suis trop jeune. Le film « Tu veux ou tu peux pas », auquel j’ai participé, a brisé le tabou. Tout le monde, handicapé ou non, peut maintenant constater que les déficients intellectuels ont la liberté d’aimer. Nous sommes comme vous.
Mathieu Breuvart, 24 ans, déficient intellectuel, résidant au foyer de vie Le Rex Meulen, à Rexpoëde
Chiffres Clés
- 18 résidents âgés de 24 à 58 ans.
- 15,75 équivalents-temps plein.
- Budget de fonctionnement annuel 2014 : 1 million d’euros.
Références
Contact : Séverine Duquennoy, 03 28 20 27 89, tuveuxoutupeuxpas@papillonsblancs-dunkerque.fr
Sommaire du dossier
- Article 01 - Handicap : le tabou se lève progressivement sur la sexualité
- Article 02 - La vie affective et sexuelle des résidents handicapés
- Article 03 - Handicap : comment prendre en compte la sexualité en institution ?
- Article 04 - Accompagner tous les aspects de la relation entre couples
- Article 05 - Non-reconnaissance de l’assistance sexuelle aux personnes handicapées
- Article 06 - En Suisse, les personnes handicapées peuvent recourir à des assistants sexuels
- Article 07 - Un jeu pour aborder la sexualité des handicapés mentaux
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